Cela fait maintenant 3 ans que j’ai le nez dans la distribution de court-métrage en festivals. D’abord avec mon premier court-métrage, La Quatorzième, distribué en 2011-2012 (environ 150 envois, 18 sélections), puis avec mon second, 8 mois, en distribution depuis 2013 (environ 150 envois à ce jour, 25 sélections, 5 prix).
Mon objectif, à travers cet article, est davantage de partager mon expérience, mes outils, d’en discuter. Je suis certains qu’il y a des choses à améliorer. Aussi, cet article s’adresse davantage au producteur / réalisateur indépendant un peu fauché qui distribue son film dans son coin, que la boite de prod bien ficelée.
Alors, comment distribuer son court-métrage dans son coin ?
La feuille Excel, indispensable
On le verra par la suite, les festivals ont plusieurs points d’entrées, les plateformes d’inscriptions poussent comme des champignons. Il est primordial de suivre les envois que l’on a effectué, de les noter, pour ne pas avoir à l’envoyer deux fois sur deux plateformes différentes. Voici les différentes colonnes de ma feuille Excel :
Festival | Pays | Deadline | Inscription en ligne / fiche remplie | DVD Envoyé | Reçu | Réponse | Sélection | Récompense | Lien | Coût d‘envoi
Il est toujours utile de noter la deadline du festival, car il est souvent le même chaque année, ce qui permet de revenir sur une longue liste d’envoi pour la distribution d’un nouveau film. Il est également intéressant de noter les refus pour évaluer le ratio sélection / refus et avoir une idée du succès du film en festivals. Enfin, le coût d’envoi, élémentaire pour gérer son budget et évaluer le coût global de la distribution.
Stratégie : première phase
Quand il s’agit d’opter pour une stratégie de distribution, la question qui brûle les lèvres est souvent « Par où commencer ? »
Dans le milieu de la distribution professionnelle, il est d’usage de consacrer les 6 premiers mois (voir la première année) aux festivals de Catégorie 1 (Cannes, Berlin..) qui, pour la plupart, acceptent votre film seulement pour une première mondiale / européenne / continentale et sont souvent payants (à hauteur de 40-60 euros).
Donc est-ce que ça vaut le coup d’y consacrer un budget conséquent lorsqu’on est (ultra) indépendant ?
Pour moi, la réponse est non. La sélection dans ces festivals jouent principalement sur 4 critères : le cv de la prod, le cv du réalisateur, le financement du film (« gage » de qualité selon certains) et, enfin, la qualité du film. Il est donc difficile de s’en sortir sans un minimum de lobbying, selon moi. Néanmoins, il est intéressant de tenter ceux qui sont gratuits, et d’avoir une idée de ces festivals.
Pour celà, Unifrance et le CNC fournissent une bonne documentation :
Descriptif du Prix de Qualité du CNC, avec une liste de festivals
Planning d’inscription d’Unifrance
Calendrier des festivals internationaux d’Unifrance
Une fois cette première phase passée (ou zappée), vient la seconde. C’est là qu’il faut s’armer de patience (et de temps).
Stratégie : deuxième phase
Si on jette un rapide coup d’oeil aux différentes sites / méthodes que j’ai utilisé pour distribuer mes deux films, on peut noter l’explosion des plateformes numériques et de leur efficacité. La distribution par courrier (majoritaire pour « La Quatorzième ») est devenue anecdotique pour « 8 mois » :
Film Fest Platform & Short Film Depot, le duo gagnant pour les festivals français
Les deux plateformes Film Fest Platform et Short Film Depot, tous deux français, sont devenus indispensables pour une distribution efficace sur le sol français. Les plus gros festivals (et les moins gros) passent par ces plateformes : Clermont-Ferrand, Aubagne, entre autres. Short Film Depot permet depuis peu d’uploader son film et de l’envoyer en ligne, mais pas Film Fest Platform, qui en est toujours au courrier / DVD.
La guerre des plateformes internationales
Concernant la distribution internationale, on est confronté à énormément de plateformes et j’en vois de nouveaux très fréquemment, à croire que c’est une incroyable manne financière (à méditer…). J’ai eu l’occasion de tester un grand nombre : Reelport, Festhome, Withoutabox, Movibeta, Film Festival Life, Festival Focus, Short Film Central, et je ne parle pas des festivals avec leur sites dédiés.Au fur et à mesure de mon utilisation, j’ai fini par me concentrer sur certaines plateformes pour des questions d’ergonomie et/ou coûts.
Avec la distribution de mon premier film, je passais beaucoup de temps sur Withoutabox. Aujourd’hui, je déconseille cette plateforme : 95% de leurs festivals sont américains, avec des frais d’inscription à 50-60 dollars (ils ont une culture de la distribution assez particulière…), leur filtre des festivals gratuits ne fonctionne pas, et ils sont relativement plus chers qu’ailleurs.
Une très bonne découverte de cette année a été Festhome qui, malgré ses pages traduits avec Google Translate (donc très sommaire…) permet d’envoyer, avec un forfait de « 30 euros » pour 6 mois, d’envoyer son film à un grand nombre de festivals. Avec tous les festivals disponibles, on peut facilement écraser les coûts par copie. Seul bémol : une grande part des festivals sont hispanophones, et des sous-titres espagnols deviennent indispensables pour une bonne distribution. Reelport reste aussi un bon complément aux autres plateformes, pour quelques festivals que je n’ai pas vu ailleurs.
Coûts de distribution
J’ai brassé les différents coûts que j’ai noté sur les différentes plateformes, pour celles que j’utilise régulièrement :
Le mauvais point de Short Film Depot, c’est qu’il contraint à acheter des « timbres » par pack, à 1 euros le timbre. L’avantage est qu’il coûte relativement peu cher d’envoyer des films depuis la plateforme : un envoi coûte très souvent un seul timbre. Mention spéciale pour sa belle ergonomie, ça fait toujours plaisir quand on passe plusieurs heures sur un même site.
Festhome reste le plus compétitif avec sa nouvelle carte d’abonnement Vimeo, mais il faut parvenir à la rentabiliser (et donc faire des sous-titres en espagnol). Par exemple, avec la carte de 6 mois à 30 euros, j’ai envoyé le film à 40 festivals. Si on compte les 20 autres festivals auxquels j’ai postulé en payant 2 euros par envoi, on arrive à une moyenne de 1,10 € par envoi, ce qui est plus que correct.
Reelport reste un bon complément au niveau des coûts aussi, avec un prix basique de 2 euros l’envoi.
Enfin, l’envoi par courrier (Film Fest Platform, Withoutabox, le courrier) reste le plus cher, entre les frais de DVD, de l’enveloppe, du papier, de l’encre… Le budget relevé est ici estimatif, car envoyer à l’étranger peut faire grimper le coût.
Vous l’aurez compris, lorsque je fais un « point festival », je commence par les plateformes susceptibles de me coûter le moins cher.
Le fin mot
Pour conclure, que dire ? Je pense qu’il faut :
- Toujours mettre à jour sa feuille Excel, et s’y référer
- Tester quelques plateformes, faire son choix et avancer avec une quantité de plateformes assez réduites, autrement on passe plus de temps à remplir des fiches qu’à envoyer le film
- Bien réfléchir sur l’envoi en festivals payants. L’expérience m’a montré que l’on peut avoir une bonne diffusion, montrer son film en région parisienne et ailleurs, en se consacrant aux festivals gratuits. Personnellement, je ne vois pas trop l’intérêt de savoir que mon film sera projeté au Kansas, et d’avoir payé 60 dollars pour. Mon objectif est que mon film soit vu, en discuter.
Et vous ? Comment distribuez-vous votre film ? Quelles sont les plateformes que vous utilisez ?
Merci huseyin pour ton analyse pertinente! C’est clair que le secteur de la distribution a tendance à évoluer vers le numérique. N’oublions pas cependant que plus le prix est moins cher plus la réception de films est forte et la sélection plus difficile je pense.
Salut Huseyin, et merci par la mention! Je vais certainement devoir revenir a toutes les traductions françaises du site, car elles ont été faites « a la main », mais pas par moi même.
Une très belle idée vôtre feuille excel. Est-ce que ça vous serait intéressant si une utilité comme cette feuille existait sûr Festhome et se remplissait automatiquement avec les envois faits par Festhome, puis manuellement par l’utilisateur pour les envois par courrier ou d’autres plateformes?
Bonjour Daniel,
Merci pour votre intérêt 🙂
Une telle feuille Excel pourrait avoir son intérêt, après cela pose la question de ce que vous ferez des informations relatives aux autres plateformes 😉
Si je peux me permettre, voici quelques points d’améliorations que je vois :
– Traduction du français (malheureusement un point faible)
– La possibilité, sur une même fiche de film, de mettre plusieurs liens vimeo / mot de passe pour les différentes versions. Aujourd’hui, j’ai dû créer deux fiches de mon film pour les versions sous-titrées en anglais et espagnols sur Vimeo, c’est très contraignant 🙂
– Les sélections en festivals sur Festhome devraient automatiquement s’ajouter sur la fiche du film, pareil pour les informations de prix et dates etc
– Une option qui serait royale : Filtrer les festivals directement par rapport à son film, en le choisissant dans un menu déroulant
Voilà ce qui me vient en tête 😉
Bon courage pour la suite !
Hüseyin
Merci Hüseyin!
Quelques de ces points sont déjà sur nos notes, mais par example la dernière c’est possible: Si vous allez sur la liste de festivals et cliquez sur la recherche, il y as une option pour chercher par film qui va cacher tous les festivals où ce film as déjà été envoyé.
Merci et dès que possible ont ajoutera toutes c’est améliorations et encore beaucoup d’autres qu’ont as sur la liste… peut á peut!
On s’est mal compris sur le dernier point : l’idée serait de filtrer les festivals qui correspondent au film mais auxquels il n’a pas encore été envoyé 😉
Bonjour,
Merci pour cet article très intéressant. Je suis moi même jeune réalisateur indépendant et me suis confronté aux même questions. Je déconseille aussi la plateforme Withoutabox. J’ai eu l’occasion d’avoir un film sélectionné dans un prestigieux festival par cette plateforme, le festival ne m’a pas invité et n’a même pas pris la peine de me renvoyer mon DCP. Ils se vantaient d’avoir reçu des centaines d’inscriptions à 30$, j’ai en fait compris que tout cet argent a servi à financer le festival et notamment payer l’hotel 5 étoiles du jury. Les envois en ligne sont pratiques car il suffit d’un clic pour envoyer votre film dans le monde entier. L’inconvenant est que le nombre de films envoyés par les plateformes shortfilmdepot et reelport est considérable (5000 films pour certains festivals). Je conseille donc de compléter vos envois par le site « festival focus » qui réunit des festivals indépendants plus accessibles. Pour une diffusion dans 200 festivals, comptez un budget variant entre 500 et 1000e. Le tableau exel est une méthode très efficace pour gérer les envois. La diffusion, c’est une chose mais n’oublions pas de faire des bons films… ab
Bonjour Alexis,
Merci pour ton retour d’expérience 😉
Je me suis inscris sur Festival Focus mais je n’ai pas encore regardé ça de plus près, je le ferais prochainement et ferais des compléments sur l’article.
Concernant le budget de distribution, j’en suis à environ 170 envois pour un budget approchant 500 euros, je pense qu’en évitant les festivals payant on peut arriver à 500 euros pour 200 festivals.
En tout cas, bon courage pour la suite !
Enfin un article intéressant sur ce sujet ! J’ai une ou deux petites précisions à te demander.
Comme beaucoup j’en suis encore au stade du film amateur autofinancé et bénévole (mais professionnel au possible). Du coup : quid des courts-métrages sans boite de production (ni visa) ? Est-ce envisageable – si on a foi en son film – de se lancer dans une campagne de soumission à des festivals via les plateformes que tu présentes ? Ou alors est-ce nécessaire, pour espérer la moindre sélection, d’avoir une boite de production, reçu des aides, ou je ne sais quelle formalité administrative ?
Merci d’avance, et bonne continuation !
Bonjour Baptiste,
Merci pour ton intérêt 😉
Justement, cet article s’adresse plus aux « non-professionnels » qu’aux pros qui ont une stratégie bien en place et une personne à temps plein sur la distribution (ils envoient en moyenne à 500 festivals là où personnellement je culmine à 200).
Par exemple, avec 8 mois, j’ai eu toutes mes sélections sans visa d’exploitation (que je viens tout juste de recevoir !) et il n’a pas de fond très reconnu au niveau international.
Donc si tu crois en ton film, tu as toutes les bonnes raisons de le distribuer, mais peut-être qu’il vaut mieux éviter les gros festivals (catégorie 1) et qui sont payants pour la plupart. A toi de voir 😉
Okay je vois. J’avais un peu la flemme de créer une boite de production/association juste pour pouvoir tenter quelques festivals…
Encore merci pour ces précieux conseils !
Bonjour Hüseyin,
Je voulais savoir, concernant la feuille excel tu as répertorié tous les festivals du monde un par un ou uniquement les plateformes ?
Il y a peu j’ai moi même répertorié les festivals français sur un .word mais j’ai vite été découragé. Jongler entre allociné, wikipedia et autres pour noter festival par festival.
Si tu as répertorié tous les festivals, ma question est: As-tu eu plus de courage que moi en les notant un par un ou tu as fait autrement ?
Sinon pour les sites de dépôt, les meilleurs sont malheureusement qu’en anglais perso que je peux peut-être partager ici.
Bonjour Franck,
En fait j’ajoute les festivals au fur et à mesure de mes envois, je n’ai pas vraiment de liste exhaustive (ce serait effectivement trop chronophage).
C’est vrai qu’il y a pas mal de sites en anglais, si tu en connais que je n’ai pas cité, n’hésites pas à les mentionner !
Bonjour,
merci pour ce site
c’est très généreux de votre part
car on a trouvé des sites pareils, mais payants
on a remarque des choses intéressantes
Nous devons prendre le temps de lire.
A bientôt !